Que se passe-t-il aux Etats-Unis depuis le dernier message posté sur ce blog. Que de suspens ! Hillary Clinton a réussi à renverser la tendance. Elle a été victorieuse dans trois des quatre Etats conviés aux primaires démocrates du 4 mars, parmi lesquels les plus importants : l’Ohio et le Texas. Mieux, elle a réussi à passer outre les facteurs qui pouvaient précipiter sa chute. Par rapport au facteur générationnel, elle a réussi à fortement mobiliser et à emporter le vote des plus de 60 ans. Barak Obama a conservé son soutien chez les 18 – 29 ans et chez les 30 – 49 ans, mais cela n’a pas suffit. Pour ce qui est du facteur économique, Hillary Clinton a su se montrer plus convaincante et elle a réussi à capter de façon très favorable le vote ouvrier. A priori, le facteur du renouveau n’a pas cette fois-ci plus joué en la faveur d’Obama que de Clinton.
A la suite de ces élections, Obama a continué à remporter des Etats (le Wyoming et le Mississippi). Malgré sa légère avance sur sa rivale et au train où se déroule la campagne, beaucoup d’observateurs émettent l’avis d’un probable règlement de la candidature lors du vote des supers-délégués, ces 795 grands électeurs qui sont censés (à moins d’une énorme surprise) transposer quasi mécaniquement le choix majoritaire des votants des Etats qu’ils représentent, durant la Convention Nationale Démocrate qui se tiendra du 25 au 28 août à Denver. A fortiori, ce au plus tard sans attendre la Convention, nous connaîtrions officieusement le nom du candidat Démocrate à l’aune de la dernière primaire qui se tiendra le 7 juin à Porto Rico.
Ainsi l’incertitude reste de mise. D’autant que la courbe des intentions de vote entre Obama et Clinton continue à faire des chassés-croisés, la dernière étant actuellement favorable à l’ancienne First Lady. Mais je ne cesserais jamais assez de le répéter, l’inhérente volatilité des sondages étant ce qu’elle est,… prudence !
Cette campagne est longue et elle est marquée par une hyper médiatisation propre à la société américaine. Les tensions et la rudesse des propos échangés entre les deux candidats sont réels. Pour ne rien arranger, dans le registre de la dramatisation, Obama qui semblait être en odeur de sainteté médiatique se voit questionné par la presse sur des sujets d’ordre religieux et/ou communautaires. Cette investigation serait-elle fomenté par le clan Clinton ? Nul ne le sait. Toujours est-il que le dernier exemple en date aurait pu être particulièrement gênant pour Monsieur Obama. La presse lui demandait de clarifier sa position à l’égard de son ancien pasteur, le révérend Jeremiah Wright (de la Trinity United Church of Christ à Chicago), ce dernier ayant prononcé un discours raciste à l’égard de la communauté blanche en appuyant son propos par un retentissant « Dieu maudisse l’Amérique ».
A tout cela, Obama a apporté une réponse a priori importante. Le 18 mars, il a prononcé un discours que d’aucuns considèrent comme le meilleur qu’il ait exposé durant sa carrière. Il a fermement condamné les mots employés par son ancien pasteur et il a mis clairement et intelligiblement en évidence une Amérique blanche et noire, multiraciale, pourfendant et bannissant ainsi le racisme. Dans une interview accordée à Anderson Cooper (CNN), il a maintenu son propos, pis il a enfoncé le clou en répondant à son intervieweur « Je pense absolument qu’une partie de son propos était antipatriotique ou contraire à l’intérêt américain (unamerican). » Sur cette affaire, sa rhéthorique est sans équivoque tout en restant subtile. Car en disant cela, il ne coupe pas définitivement les ponts avec l’homme à qui il doit beaucoup en terme d’apport spirituel.
Cette nouvelle séquence met une lumière crue sur des problèmes de fonds, ceux de la discrimination, que (espérons-le) un des deux candidats démocrates s’emploiera à réduire, dans le cas bien entendu où l’une ou l’autre soit élu président. L’un des meilleurs éditorialistes du New York Times, Nicholas D. Kristof ne s’y trompe pas en affirmant dans sa dernière chronique (datée du 20 mars) que : « Tout ceci démontre qu’un dialogue national sur la race est douloureux, maladroit et essentiel. Et ce dialogue ne doit pas se focaliser sur des morceaux de vieux sermons de Monsieur Wright mais sur des défis bien plus pressants – par exemple, celui-ci : environ la moitié des hommes noirs ne reçoivent pas un diplôme du secondaire. »
En guise de conclusion personnelle, je reste persuadé qu’avec Barak Obama élu à la présidence, les Etats-Unis entreraient (en terme de politique intérieur) dans une nouvelle ère, celle d’une Amérique plus généreuse, transcendant les aspects communautaires et tendant vers une réduction des discriminations et des inégalités sociales. Pourvu que cet épisode lui permette de rebondir très prochainement.
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P.-S. : Pour multiplier les angles, je vous recommande chaleureusement le dernier post de Laurent Bouvet : cliquez ici.